Après vérification auprès des familles et des personnes hébergées, la hausse des loyers ne concerne que quelques ressources de Montréal et ne se traduit pas par des centaines de dollars, mais bien par une augmentation plus modeste. Néanmoins, il s’agit d’une « harmonisation » qui aurait été prévue depuis des années (dixit le CIUSSS) et qui se fait d’un coup, et comme souvent, dans la précipitation et l’improvisation.

Les résident-e-s des autres ressources ont vécu année après année cette augmentation de loyer. Par principe d’équité, on peut comprendre, même si on espère toujours que les exceptions allant vers des conditions meilleures et plus accessibles soient la base du calcul plutôt que l’inverse (aller vers le plus cher). Et ceci pour l’ensemble des citoyen-ne-s du Québec. Sauf que là, on parle des plus vulnérables parmi les vulnérables.

Que se passerait-il pour vous, citoyen-ne-s sans handicap, si votre propriétaire vous donnait un avis de 3 semaines seulement et que votre loyer était augmenté entre 10 et 75 dollars?

Même si on vous l’expliquait avec un principe «d’harmonisation» et d’équité? Au mieux vous auriez des recours…eux et elles n’en ont pas car les ressources ne sont pas soumises à la Régie du logement, mais relèvent du ministère de la Santé et des Services sociaux. Sans parler de la désuétude de plusieurs installations, du roulement de personnel et du manque de formation offerte aux intervenant-e-s…

Même si les personnes ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme, leurs familles ou proches et les organismes qui défendent leurs droits ne vivent pas au pays des arc-en-ciel, il faut savoir que ces personnes doivent payer entre 832 et 1025 $ par mois en cohabitation. Là est le vrai scandale : non pas les quelques personnes hébergées qui se sont vu imposer cette augmentation, mais le montant qu’elles payent pour leur hébergement.

Et pour quoi payent-elles? Leur contribution ne sert pas à payer l’accompagnement éducatif dont elles ont besoin, mais le gîte (et les coûts reliés comme l’électricité) et le couvert, les articles d’hygiène et les équipements utilisés à des fins thérapeutiques.

Mais voilà, elles payent en plus pour internet, elles ne choisissent pas ce qu’elles mangent, et sauf quelques exceptions, vous n’aimeriez pas les repas qu’on leur sert, les produits d’hygiène sont de base et les moins chers possible, elles vivent en groupe mais sans choisir leurs colocataires, elles ne choisissent ni les heures de repas, ni l’heure du coucher.

Et que reste-t-il après avoir payé la « contribution » (le loyer)? Un montant fixe maximal d’environ 256 $ pour leurs dépenses personnelles, ce qui est appelé « allocation ». À notre connaissance, les directives ministérielles les plus récentes indiquent qu’une allocation de 273 $ devrait être disponible pour les résident-e-s. Où va ce 17$ manquant par mois? Seuls les CIUSSS/CISSS le savent… À tout le moins, on peut affirmer que nous sommes très loin de la perspective de lutter contre la pauvreté!

Bien des personnes au Québec n’ont pas plus dans leurs poches après avoir dû payer l’essentiel. Oui, et c’est aussi un scandale. Rappelons toutefois que pour les personnes ayant une déficience, l’ensemble des coûts des activités de loisirs est plus dispendieux en raison de leur besoin d’accompagnement et d’équipements spéciaux. En forte majorité, elles n’ont aucune possibilité d’améliorer leurs conditions de vie en travaillant… et qu’en plus, on ampute leurs prestations d’aide sociale si leur revenu est bonifié ponctuellement (héritage, dédommagement, etc). On peut ainsi affirmer que le processus d’autodétermination des personnes n’est pas appliqué!

Qui voudrait vivre de cette façon? Voudriez-vous être dans leur situation?

Caroline Langevin, Corporation l’Espoir

Ghislaine Goulet, Comité régional pour l’autisme et la déficience intellectuelle (CRADI)

Marie Josée Dodier, Services résidentiels Chez soi

Véronique Couture, Un Prolongement à la Famille de Montréal

Julie Champagne, Autisme Montréal

Delphine Ragon, Parents pour la déficience intellectuelle (PARDI)

Stéfania Tremblay, Les Jumeleurs/espace communautaire

Anik Larose, Société québécoise de la déficience intellectuelle (SQDI)

Marianne Dupéré, Sans oublier le sourire (SOS)

Mathieu Francoeur, Mouvement des personnes handicapées pour l’accès aux services (PHAS)