Ça sonne très « complotiste » vous direz, mais c’est une hypothèse loin d’être farfelue.
Dans l’une de ces vidéos, on voit des policiers du Capitole enlever les barrières de métal pour laisser entrer des dizaines de putschistes – car c’est bien de cela qu’il s’agit, et non des « manifestants » comme le répètent depuis hier de nombreux médias encore incapables d’appeler un chat un chat. D’autres se sont livrés à des séances de selfies empreintes d’une apparente et dérangeante camaraderie.
Autre question : où était la Garde Nationale du District de Columbia? Un peu partout, on évoquait des raisons logistiques propres à la nature de la Garde nationale, dont les membres sont militaires à temps partiel. Pourtant, elle avait été mobilisée à Washington en amont des manifestations du mouvement #BlackLivesMatter en juin dernier. À Portland, Trump a même ordonné l’envoi de « troupes fédérales » armées jusqu’aux dents, non-identifiées et sous le contrôle officieux de son sous-fifre de procureur général, Bill Barr.
Fait intéressant : contrairement aux gardes nationales des états qui sont sous la juridiction des gouverneurs, celle du District de Columbia est sous le commandement direct du Président. Mais il aura fallu une rencontre au sommet entre Mike Pence, Nancy Pelosi, Chuck Schumer (leader de la minorité au Sénat) et le secrétaire à la défense Christopher Miller pour activer la Garde… une rencontre avec un président in abstentia.
Trump l’a souvent répété au cours de son règne : il clamait avoir le soutien de l’armée, de la police, des « durs à cuire » du pays… même celui des motards – étrange et intéressante spécification quand même, mais je digresse. On ne compte plus les fois où, sur les réseaux sociaux, on a vu des policiers laisser libre cours à la sauvagerie des militant.e.s d’extrême-droite, dont Kyle Rittenhouse, le petit fasciste qui a abattu des manifestants à Kenosha au Wisconsin. Il a demandé aux Proud Boys, groupuscule d’incels devenu une véritable secte néo-nazie (Des « paradeurs folkloriques », dirait Mathieu Bock-Côté), de « se tenir prêts » à la fin du deuxième débat présidentiel. En août dernier, The Guardian rapportait que de nombreux corps policiers avaient été infiltrés par des groupes d’extrême-droite.
Tout ça encourage à méditer sur ces questions en attendant les faits.
Insurrection
Et malheureusement, cette tentative de coup d’État fasciste, sans soutien de l’armée ni véritable leadership, mènera vraisemblablement à une insurrection, à défaut d’une guerre civile à proprement parler – très peu de chances, donc, d’assister à un remake de la Guerre de Sécession. Mais je ne serais pas surpris que des centaines de vies innocentes soient fauchées par la folie meurtrière d’un nouveau Timothy McVeigh.
Ils peuvent compter sur la parole influente des Tucker Carlson, Sean Hannity (qui disait encore hier que les putschistes étaient « largement pacifiques »), Alex Jones, pour ne nommer que ceux-là. Ils ont la bénédiction des pasteurs-icônes de la droite chrétienne qui ont fait de Trump une véritable figure messianique et qui feront des Proud Boys et autres les talibans américains.
Et contrairement à Black Lives Matter qu’on accuse à tort de violence extrême, leur cause n’est objectivement pas juste : un retour à une Amérique franchement suprémaciste, blanche et christiano-fasciste. Celle d’après Jim Crow et d’avant Malcolm X. Celle qui serait au diapason de la nébuleuse d’extrême-droite européenne, mais possédant l’arme nucléaire.
« L’armée de Trump » est désormais en marche. Peu importe ce qui se concrétisera, nous assisterons probablement à l’inévitable chute finale de l’Empire américain de notre vivant.