D’abord, devoir de transparence : je suis porte-parole de la Campagne du coquelicot blanc du Collectif Échec à la guerre depuis l’an dernier. J’ai été présent aux deux dernières commémorations du Jour du Souvenir auprès des militantes et des militants antiguerre qui s’y rassemblent chaque année pour une vigile silencieuse qui sert à rappeler que les premières victimes de la guerre, ce sont les civils innocents pris dans les feux croisés de la folie des hommes.

Ça m’a permis de constater que le mouvement contre le militarisme bat de l’aile, un peu comme ce perroquet que j’ai longtemps vu mourir à petit feu dans sa cage à l’animalerie du coin. On pouvait deviner le plumage autrefois majestueux de l’oiseau alors qu’il n’en restait que des parcelles, entre deux marques de bec à force de se les arracher.

Et comme ses caquètements, les voix qui s’élèvent contre la guerre et le militarisme ne sont devenues, au fil du temps, qu’un bruit de fond.

Nous vivons une époque où tout s’entrechoque : urgence climatique, guerres, capitalisme sauvage auquel les puissants du monde ont enlevé la fragile laisse, inégalités croissantes entre les peuples du Nord et du Sud, montée de l’extrême-droite qui retrouve ses officines dans les parlements du monde dit «civilisé».

L’Australie ressemble à la fusion des sept cercles de l’enfer, les océans s’acidifient, des espèces s’éteignent avant leur temps.

Les peuples occidentaux manifestent leur fatigue démocratique et applaudissent le retour de l’autoritarisme si fort qu’on entend le bruit de nos chaines.

Et encore, quelle démocratie? Celle «libérale» vendue par les grandes institutions médiatiques? Un crochet au crayon mine tous les quatre ans? Un chèque en blanc à nos «représentants» qui se retournent et voient aux intérêts particuliers des copains entre deux cognacs dans les clubs privés? Celle où les courroies de transmission médiatiques des think tanks néolibéraux cherchent à tuer la légitimité des syndicats au nom de ce fallacieux «droit au travail»? Celle où la pensée «libérale-réaliste» des chaires de recherche en science politique continue de perpétuer le mythe de l’interventionnisme «humanitaire» au nom de la «responsabilité de protéger»? Où les universités participent à la recherche et au développement de l’industrie de l’armement?

Je m’égare? À peine.

Car le tronc commun de toutes ces catastrophes qui menacent la survie du genre humain, c’est la recherche de profit, celle qui fait disparaître toute notion d’empathie et de compassion, celle qui dévore les âmes et transforme les hommes en monstres.

Et à l’heure où des mouvements ultranationalistes appellent de leurs clairons à la division artificielle de l’Humanité et que la société de la consommation et du divertissement endort nos consciences, le mouvement antiguerre reprend tout son sens, à l’intersection des autres.

Ces lignes, je les écris au moment où Donald Trump s’adresse au peuple américain après que ce pays, le cœur de l’empire, ait poussé le monde un peu plus près du ravin.

Souvenons-nous de ces 250 000 personnes qui étaient descendues dans les rues de Montréal il y a un peu plus de quinze ans pour rejeter l’impérialisme américain.

Partout où mes souliers ou mes bottes de combat ont posé pied, je me suis davantage identifié aux hommes et aux femmes de ces nombreux peuples côtoyés qu’aux politiques et aux membres des classes dominantes de ma propre société.

Laissons-les combattre leurs guerres en paix.

Aidons le phénix à renaitre de ses cendres.