« Quand j’étais plus jeune, le fait d’avoir une équipe avec laquelle jouer m’avait aidé à passer à travers mon secondaire et m’a permis de canaliser mon énergie, dévoile Patrick. Je m’étais dit que dans la même idée, [faire partie d’une équipe] inciterait sûrement d’autres jeunes à vouloir fréquenter l’école. »
C’est dans cette optique, et afin de renforcer le lien entre les études et le sport qu’il a choisi de bâtir les infrastructures sportives sur le terrain de l’école du village. « Inévitablement, ça amène les jeunes à vouloir fréquenter cette école et ça lui donne un plus grand attrait », résume-t-il. Récemment terminé, le projet a d’abord débuté en 2016, période à partir de laquelle Patrick a cherché du financement pour son projet, lançant notamment la campagne Un ballon pour Mwumba.
Maintenant âgé de 29 ans et possédant la citoyenneté canadienne, Patrick est né à Mwumba, au Burundi. À l’âge de 9 ans, il a émigré à Gatineau avec sa famille, où il a passé le reste de son enfance. En 2015, il a déménagé seul à Québec afin de poursuivre ses études à l’Université Laval, où il fait présentement un baccalauréat en éducation physique. Toujours actif, il continue de jouer au basket lors de ses temps libres avec l’Urunani, une équipe civile de la région de Gatineau.
Les origines d’une initiative
L’idée de son projet provient d’un voyage qu’il a effectué au Burundi en 2011, le premier qu’il y faisait depuis son immigration. « Comme j’adore le basket, j’avais apporté un ballon en me disant que j’allais trouver des endroits où jouer, révèle-t-il. Il y avait effectivement des terrains dans les grandes villes. Mais lorsque je suis arrivé dans le village où je suis né, je me suis rendu compte que non seulement il n’y avait pas de terrain de basket, mais que les gens ne connaissaient pas ce sport. » Une vague idée a alors commencé à germer dans son esprit. Puis, lors d’un second voyage en 2013, il s’est promis qu’un jour, lorsqu’il en aurait les moyens, il y construirait un terrain de basket. C’est cependant lorsqu’il a débuté le programme d’éducation physique à l’Université Laval que l’idée lui est revenue et qu’il a entrepris des démarches sérieuses pour la concrétiser.
À partir de ce moment, Patrick a organisé de nombreuses activités dans la région de Québec, dont un lave-auto et une vente de chandails afin d’amasser les fonds nécessaires. Il a également mis sur pied un spectacle auquel participaient plusieurs artistes. Au total, le coût de son projet s’élevait à 30 000 $. « Le financement a été un gros défi, ça n’a vraiment pas été évident. Malgré tout, j’ai pu réunir une grande partie de la somme, confie Patrick. Mais ce n’était pas assez et j’ai dû piger dans mes propres économies pour réaliser le projet dans les délais que je m’étais fixé. »
La concrétisation
C’est au mois d’août dernier, après de nombreux efforts et sacrifices, que le terrain de basketball a pu être mis sur pied. Pour l’inauguration, Patrick avait invité Le Messager de Ngozi, une équipe professionnelle provenant de l’une des grandes villes du Burundi. « Ça a vraiment attiré l’attention, les gens de Mwumba ont vraiment embarqués et criaient pour encourager chaque fois qu’un panier était marqué », s’exclame-t-il.
Patrick est lui-même resté deux semaines sur place, semaines au cours desquelles il dirigeait de nombreux entraînements afin d’expliquer les bases du jeu. Ceux-ci se sont avérés très populaires, alors que le terrain était toujours plein et que des joueurs devaient même attendre leur tour à l’écart. « À la première journée d’école, les jeunes se battaient presque pour pouvoir toucher aux ballons, c’était vraiment quelque chose », révèle-t-il en riant.
Maintenant de retour au Québec, Patrick garde un œil sur l’évolution de son initiative à travers ses contacts sur place. Un entraîneur de la ville de Ngozi se rend également à Mwumba deux fois par semaine afin d’y conduire des entraînements.
«Pour ce qui est de la suite, ce que je voudrais faire, c’est un suivi pour être sûr qu’il ne manque jamais de matériels, explique-t-il. Je veux que ça puisse continuer à long terme. Par exemple, c’est très difficile pour eux de se procurer des ballons». À ce niveau, Patrick a notamment pu compter sur le soutien du Rouge et Or de l’Université Laval qui lui a fourni de l’équipement sportif. À son prochain voyage, il compte ainsi apporter davantage de ballons, maillots et souliers pour les joueurs. « Éventuellement, j’envisagerais aussi de construire d’autres terrains, que ce soit au Burundi ou ailleurs, confie-t-il. Maintenant que j’ai pu en faire un, j’espère que d’avantages de gens y croiront et embarqueront dans l’aventure. »