Le 4 septembre dernier, aucun des adversaires n’est sorti vainqueur du débat organisé par Force Jeunesse. L’assistance a cependant hué des mesures comme la hausse d’impôts et les compressions dans la fonction publique avancées par la CAQ. Entre temps, le chef du Parti vert Alex Tyrell a manifesté son mécontentement d’être exclu de la conversation à l’extérieur de l’auditorium, en compagnie de ses partisan-es majoritairement âgé-es de moins de 35 ans.

Le dialogue se répercute en dents de scie sur les campus. Au début de l’été, l’Union étudiante du Québec (UEQ) qui regroupe plus de 220 000 universitaires a rédigé avec eux cinq préoccupations décisives : la juste rémunération des stages, le financement des services sociaux, incluant ceux en santé mentale, le favoritisme dans l’investissement en recherche et le dérèglement des frais de scolarité défrayés par les étudiants internationaux.

«À chaque fois qu’on parle de ces enjeux, ça mène à des débats très constructifs, et à des histoires vécues par les étudiants. On sent qu’il y a un fort intérêt sur le campus. Les jeunes comprennent que leur choix va déterminer les résultats du 1er octobre prochain», observe Guillaume Lecorps, président de l’UEQ. De même que la participation de la jeunesse constitue un enjeu central pour les partis. L’association dit recevoir des demandes incessantes des élu-es pour attirer les jeunes dans l’arène politique.

La fédération collégiale étudiante (FECQ) s’est adonnée au même exercice après un an de consultations avec ses 78 000 membres. À partir de 31 revendications retenues, le transport en commun, la lutte à la violence à caractère sexuel, le développement durable et la compensation financière des stages ont émergé de la tempête d’idées des cégépiens.

Pour intéresser les jeunes, il faut être intéressant. Il faut parler d’enjeux qui les concernent. C’est pourquoi on a dressé une sorte de liste d’épicerie : cinq revendications que la jeunesse désire entendre parler. Si les partis convoitent l’appui des jeunes, ils doivent se compromettre et s’engager sur ces revendications »

— Guillaume Lecorps, président de l’Union étudiante du Québec.

Ils sont d’ailleurs au rendez-vous quand on les interpelle. Il suffit d’orchestrer des événements qui les visent directement. Les candidat-es dans Sainte-Marie–Saint-Jacques étaient réunis pour un débat le 6 septembre dernier au cégep du Vieux-Montréal et la salle était pleine à craquer.

Les élèves présent-es ont préparé des questions sur des enjeux qui les touchaient directement tels que l’environnement, l’éducation et la souveraineté. D’autres questions ont aussi porté sur les plateformes des partis pour se faire une idée informée des choix à leur disposition. D’autres sont venus au débat avec un favori en tête : «Je savais déjà pour qui je souhaitais voter, mais je suis maintenant un peu plus certaine de mes positions et ça m’a donné encore plus envie de voter», affirme Stella Morrisette.

Bien que le débat ait suscité de l’engouement, certains jeunes constatent des lacunes au mode de scrutin actuel. «Je ne crois pas que ça donne grand-chose avec le système actuel, mais je le fais pour ne pas qu’on me reproche de ne pas voter», explique franchement le cégépien Étienne Mongeau.

«Le débat m’a convaincu de ne pas voter. Je constate que c’est une image artificielle. Les partis ne veulent pas se parler et aucun n’est prêt à faire des compromis».

Même son de cloche du côté d’Alexandre Milette-Gagnon, qui estime que les candidat-es se limitent à une partisanerie, qui divise et empêche de concrétiser de véritables projets de société. «Mais ça ne m’empêchera pas de voter», précise-t-il. Pour d’autres, le cynisme politique est déjà entamé, comme dans le cas d’Anne Colpron : «Le débat m’a convaincu de ne pas voter. Je constate que c’est une image artificielle. Les partis ne veulent pas se parler et aucun n’est prêt à faire des compromis». Le FECQ tente de sensibiliser ses membres contre ce détachement en publiant des capsules d’informations et en mobilisant les associations étudiantes sur le terrain pour sortir le vote.

Le «fort électoral» reprend notamment le concept de la boussole électorale. Dans les couloirs des cégeps, on peut lire des cartons les positions des différents partis. «Ça permet de voir en un clin d’œil quel parti représente le mieux les intérêts des étudiants», s’enthousiasme Fred-William Mireault, président de la FECQ.

Malgré les efforts des associations étudiantes, les jeunes ne se dirigeront pas vers l’isoloir s’ils ne se sentent pas écoutés par les partis politiques. «On n’entend pas parler d’environnement, ni des cégeps et des universités depuis le début de la campagne, des enjeux pourtant chers aux jeunes électeurs», déplore M. Mireault.

Finalement, les échanges avec le jeune électorat passent inévitablement par les réseaux sociaux. Ceux-ci s’y abreuvent presque exclusivement pour s’informer sur l’actualité politique. «Les partis nous ont rencontrés et plusieurs veulent porter nos enjeux, mais n’ont pas encore prévu d’annonces concrètes. Un politicien peut par exemple nous dire soutenir la compensation des stages, mais s’il ne l’affirme pas ailleurs dans ses communications, l’effort s’avère inutile», conclut le président de la FECQ.