La Cour a rejeté plusieurs des contestations formulées à l’endroit de la recommandation de l’Office national de l’énergie d’approuver le projet, considérant que le rapport de l’ONE ne pouvait pas faire l’objet d’un contrôle judiciaire, mais a reçu les demandes contestant le décret qui, « sur le plan juridique, [est] la seule décision faisant l’objet d’un contrôle ».
Ses conclusions annulent le décret d’approbation du pipeline, invalidant du fait même le certificat d’approbation des travaux émis par le gouvernement fédéral. La Cour a renvoyé l’affaire au gouvernement pour qu’il corrige deux lacunes : 1) le processus d’examen vicié de l’Office nationale de l’énergie et 2) le non-respect du gouvernement de son obligation à consulter les peuples autochtones.
La Cour a ordonné au gouvernement de retourner à la table de travail, exigeant une réforme du processus d’examen de l’Office national de l’énergie et une reprise de la consultation des peuples autochtones.
Les implications de cette décision ne sont pas encore tangibles mais elle retardera presque certainement le projet de pipeline de quelques années si le gouvernement choisissait de faire appel de cette décision à la Cour suprême du Canada ou décidait de reprendre le processus de consultation.
La décision de la Cour suspend la construction du pipeline, abandonnant le projet à un flou juridique pour les prochains temps.
Nous examinons la décision complète et cette publication sera mise à jour avec de plus amples détails à mesure qu’ils deviendront disponibles. Un résumé de la décision de la Cour est accessible ici.
Voici les passages-clés du résumé de de la décision de la Cour :
Décision : Les demandes de contrôle judiciaire du rapport de l’Office sont rejetées. Le rapport de l’Office n’est pas susceptible de contrôle. Le décret est, sur le plan juridique, la seule décision faisant l’objet d’un contrôle. Les demandes de contrôle judiciaire du décret sont accueillies. Le décret devrait être annulé, et le certificat est par le fait même annulé. La question de l’approbation du projet devrait être renvoyée au gouverneur en conseil pour remédier à deux défauts, décrits ci-après, et, ensuite, pour une nouvelle décision.
La validité du décret est contestée pour deux motifs principaux : premièrement, le processus et les conclusions de l’Office étaient à ce point viciés qu’il n’était pas raisonnable que le gouverneur en conseil se fonde sur le rapport de cet organisme ; deuxièmement, le Canada n’a pas respecté son obligation de consulter les peuples autochtones. La Cour a accepté les deux motifs.
Les détails du rejet du processus de l’ONE :
L’Office a toutefois commis une erreur cruciale : il a de façon injustifiable défini la portée du projet de manière à ne pas inclure la circulation de navires-citernes connexe au projet. Cette exclusion a permis à l’Office de conclure que, même s’il avait jugé que l’exploitation de navires en lien avec le projet était susceptible d’avoir des effets négatifs importants sur l’épaulard résident du sud, le projet n’était pas susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants. L’exclusion injustifiée du transport maritime en lien avec le projet de la définition du projet a fait de sorte que le rapport de l’Office comporte des lacunes inacceptables : le rapport ne pouvait pas fournir au gouverneur en conseil les renseignements et les évaluations dont il avait besoin pour déterminer l’intérêt public, notamment les effets environnementaux du projet. Il s’agissait de questions que le gouverneur en conseil était juridiquement tenu d’évaluer. Par conséquent, le gouverneur en conseil doit renvoyer à l’Office les recommandations et conditions de celui-ci pour nouvel examen, tenant compte de tout facteur précisé par le gouverneur en conseil dans le délai prévu par ce dernier.
Sur l’échec d’une consultation adéquate des Premières Nations :
Le gouvernement Canada devait prendre part à un véritable dialogue réfléchi. Cependant, pour l’essentiel, ses représentants se sont contentés de consigner les préoccupations des demandeurs autochtones et de les transmettre aux décideurs. Le dossier en général ne révèle pas de véritable dialogue réfléchi en réponse aux préoccupations exprimées par les groupes autochtones. L’obligation juridique du Canada ne se résume pas à recueillir et à consigner les préoccupations et les plaintes. (…) Dans l’ensemble, sur la question de la consultation avec les peuples autochtones, même si le Canada n’est pas tenu à une norme de perfection pour s’acquitter de son obligation de consulter, il en effet a omis d’engager un véritable dialogue et de se pencher sur les réelles préoccupations des demandeurs autochtones de manière à être en mesure de rechercher des mesures pour y répondre. Il ne s’est pas adéquatement acquitté de son obligation de consulter.
Par conséquent, le Canada est tenu de recommencer les consultations de l’étape III. Le projet ne pourra être présenté au gouverneur en conseil qu’une fois les consultations terminées et les mesures d’accommodement prises.