Le parti, qui existe légalement au Québec depuis 2011, compte présenter ses premiers candidat-e-s à l’Assemblée nationale en 2018.

«On n’a qu’à regarder le contexte politique actuel au Québec,» dit M. Ducasse pour expliquer le timing de son geste. «Le Parti libéral a une orientation très à droite; en pratique, c’est un parti conservateur. De l’autre côté, on a un Parti Québécois qui est complètement flou et confus, tant sur son orientation idéologique que sur sa stratégie référendaire. Beaucoup de personnes qui votent pour le Parti libéral le font uniquement parce qu’ils ne sont pas souverainistes. C’est important de donner à ces électeurs et électrices une option fédéraliste progressiste. On veut que les gens puissent voter sans se pincer le nez.»

Beaucoup de personnes qui votent pour le Parti libéral le font uniquement parce qu’ils ne sont pas souverainistes.

M. Ducasse élabore les débuts d’une plateforme de parti dans une lettre ouverte sur Facebook où il dit vouloir militer pour un réinvestissement dans les services publics, particulièrement en région. «Beaucoup trop de nos régions ressources, de nos villes éloignées et de nos villages meurent à petit feu,» dit le natif de Sept-Îles.

Quant à la souveraineté, le chef intérimaire du parti voudrait négocier avec le gouvernement fédéral pour obtenir davantage de pouvoirs dévolus, tout en restant dans la Confédération. «Il est possible de s’affirmer sans se séparer,» dit-il.
«On débat de l’idée d’un NPD au Québec depuis au moins 2005,» dit Raymond Coté, ancien député fédéral de Beauport-Limoilou, qui fait partie du comité organisateur du parti provincial dans la région de Québec. «À l’époque, les militant-es voulaient se concentrer sur le fédéral. Depuis les élections de l’automne dernier, beaucoup de militants pensent à la relance d’un parti au provincial.»

Pour M. Côté, la raclée que le NPD de Thomas Mulcair a reçue aux dernières élections fédérales, où il a perdu plus de 40 sièges au Québec, n’est pas un rejet de l’idéologie sociale-démocrate ou fédéraliste — au contraire. «Le momentum qu’on a gagné en 2011 a été brisé en 2015 par des circonstances hors de notre contrôle,» explique celui qui a perdu son siège au profit du Parti conservateur.

«Pour beaucoup de citoyens et de citoyennes, la priorité était de battre Stephen Harper. Ce n’était pas un verdict contre nous. On a bâti quelque chose en 2011 et on a toujours beaucoup de potentiel au Québec, tant au provincial qu’au fédéral.»
M. Ducasse précise que le parti est indépendant de son parent idéologique au fédéral. «La loi québécoise interdit au parti fédéral de partager des fonds ou des listes avec le parti provincial, ce qui n’est pas le cas dans les autres provinces. Pensons au Parti Québécois et au Bloc québécois, qui ont des similitudes, mais qui sont indépendants l’un de l’autre.»

Lors d’une réunion de jeunes néodémocrates tenue la semaine dernière à Montréal, certains étaient très enthousiastes; d’autres étaient moins convaincus.
«Un NPD au provincial tiendra tête aux partis de droite quand ils s’opposeront aux idéaux progressistes,» dit Sean English, un jeune militant montréalais. «Oui, Québec solidaire sert à ça, mais certaines personnes ne voteront jamais pour un parti souverainiste.»

Offrir une alternative fédéraliste

«J’aime beaucoup l’idée [d’un parti NPD au provincial],» dit Marie-Lou Dufour, 22 ans, du Saguenay. «Ce qui m’a attiré au NPD, c’était les candidat-e-s, qui étaient jeunes et qui ne se ressemblaient pas au stéréotype d’un député. Ils ont amené une vision positive de la politique. Ils parlaient d’être pour des choses plutôt que contre des choses, et ça m’a beaucoup attirée.»

On devrait avoir un parti progressiste qui se focalise sur des politiques plutôt que sur la question de la souveraineté.

La militante Angèle Pineault-Lemieux, 19 ans, n’est pas convaincue. «Je ne vois pas l’utilité de diviser le vote progressiste sur des lignes fédéralistes et souverainistes,» dit-elle. «On devrait avoir un parti progressiste qui se focalise sur des politiques plutôt que sur la question de la souveraineté.»

«Québec solidaire n’est pas l’ennemi,» dit Pierre Ducasse. «J’ai voté pour eux dans le passé. Ils sont forts dans certaines circonscriptions sur l’ile de Montréal, mais pas nécessairement en région. Nous, on essaie de se mobiliser en région.»
«Notre objectif, ce n’est pas de présenter une personne à tout prix dans chacune des 125 circonscriptions du Québec,» dit Côté. «Dans certaines circonscriptions, surtout à Montréal, c’est vrai qu’on diviserait peut-être le vote progressiste, mais dans d’autres, par exemple dans l’ouest de l’Ile et en Outaouais, ce n’est pas le cas.»

«En tant que progressiste, j’ai vu 30 ans de régression dans les programmes sociaux au provincial,» poursuit l’ancien député, qui n’a pas exclu la possibilité de chercher un siège à l’Assemblée nationale. «Je veux élargir le territoire des idéaux progressistes au Québec. Si on arrivait à stimuler ce débat, ça pourrait même aider Québec Solidaire. Il faut défendre des idéaux progressistes surtout. C’est un beau défi, et je pense qu’on pourrait surprendre des gens en 2018.»