À la fin de l’année 2015, à la CdP-21, le Canada avait surpris plusieurs pays et experts lorsque sa délégation a appuyé une restriction planétaire de haussement de la température jusqu’à une limite de 1.5 degrés celsius. À l’échelle globale, le gouvernement s’était engagé à investir 2.6 milliard de dollars dans les investissements internationaux, dont 800 millions annuellement d’ici 2020, pour aider les pays les plus vulnérables, ainsi que les pays «en développement» à atténuer leurs émissions et à s’adapter aux néfastes effets liés aux changements climatiques. Il a promis de consacrer 20 milliards de dollars dans l’investissement dans les infrastructures vertes sur dix ans.
Des actions contradictoires
Au mois de mars, lors de la présentation du budget fédéral, les groupes environnementaux ont qualifié ce budget de «passable». Malgré ses efforts en matière d’investissement en infrastructures «vertes», le Canada continue à financer l’industrie pétrolière. Ainsi, il fait un pas en avant et deux en arrière en octroyant 3,3 milliard de dollars par année à l’industrie des carburants fossiles.
Ce même mois, une rencontre a eu lieu entre les premiers ministres provinciaux et le Premier ministre Trudeau, afin d’engager une discussion nationale sur le climat et le rôle des provinces dans les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), tout en respectant les compétences de chacun. Ces discussions ont, entre autres, amené le gouvernement à proposer une taxe sur le carbone de 10$ la tonne pour 2018. Malgré ces bonnes intentions, il s’agit d’une mesure extrêmement faible si l’on considère que le Canada continue de subventionner les carburants fossiles. Selon l’Agence «International Energy Agency», les subventions aux compagnies pétrolières équivalent à 36$US par tonne de CO2 émise, presque 4 fois de plus que ce le gouvernement canadien propose d’imposer comme taxe en 2018. En outre, le gouvernement vient tout juste d’approuver le projet Pacific NorthWest LNG qui vise à installer un terminal gazier avec un oléoduc d’une longueur de 900 kilomètres dans l’ouest du pays. Ce projet contribuera à une augmentation importante des GES du pays. Un groupe de chercheurs internationaux a démontré qu’en additionnant les émissions générées en amont ainsi que celles provenant de l’installation, la Colombie-Britannique risque d’augmenter ses émissions totales de 18,5% à 22,5% ce qui met virtuellement le Canada dans une situation d’impossibilité lorsque vient le temps de respecter ses engagements internationaux pour contrer le réchauffement climatique.
Au mois de mai, le gouvernement fédéral a déclenché une série de consultations nationales afin de mettre à jour le plan de lutte contre les changements climatiques. L’initiative a été reçue favorablement par le public et les groupes environnementaux, mais aussi dénoncée par les groupes environnementaux pour le manque de transparence et les délais flous dans l’organisation des événements. La société civile s’est organisée pour demander des événements de consultation dans toutes les circonscriptions et une durée des consultations plus longue. Le gouvernement a prolongé cet exercice de deux mois additionnels. Après plus d’une centaine de rencontres publiques partout au Canada, le gouvernement s’est engagé à présenter un nouveau plan d’action contre les changements climatiques à la fin du mois de novembre, après la CdP-22.
La ratification de l’Accord de Paris a également été l’un des moments clés de 2016. Effectuée au début du mois d’octobre, cette ratification par le Canada a permis l’entrée en force de l’Accord de Paris à l’échelle mondiale, quelques jours avant la CdP-22. Il y a cependant un bémol à souligner. Le Canada a conservé un engagement national peu ambitieux en matière de réduction de GES. Hélas, les instruments de ratification canadiens incluent toujours les contributions nationales proposées en 2015 ce qui, à ce jour, représente la contribution la plus faible parmi les pays du G7.
Un devoir de cohérence
À l’ouverture de la Conférence des Parties à Marrakech, il est important de se demander comment le Canada se positionne à l’échelle internationale. Arrivera-t-il à maintenir sa promesse de réduire ses émissions de GES de 17% par rapport au niveau de 2005? Le Canada sera-t-il sur la voie du succès pour atteindre son nouvel objectif de réduction de 30% sous le niveau de 2005, à l’horizon 2030?
Si le Canada est sérieux dans sa démarche et reconnaît qu’en tant que pollueur majeur, il a une responsabilité de partage du fardeau en ce qui concerne les effets néfastes du réchauffement planétaire à l’échelle globale, le gouvernement devrait hausser sa contribution au financement climatique international à quatre milliards de dollars par année d’ici 2020, tel que recommandé par la coalition Réseau Action Climat.
Enfin, la proposition d’une taxe sur le carbone à 10$ la tonne en 2018 tout en continuant de subventionner l’industrie fossile prouve qu’il existe toujours une profonde contradiction dans la volonté du Canada de lutter sérieusement contre les changements climatiques. La délégation canadienne doit être préparée à répondre aux questions de ses homologues internationaux concernant la dichotomie entre ses intentions de lutter contre les changements climatiques tout en subventionnant l’industrie du pétrole et en soutenant la construction d’infrastructures additionnelles pour l’exploitation et le transport de carburants fossiles.