Burlington, Vermont. L’antre du désormais seulement sénateur Bernie Sanders. Sa demeure encore à ce jour. Le Chicago de Barack Obama. Nous sommes allés voir ce que les gens avaient à en dire directement dans sa ville. Certain-es sont déçu-es, d’autres, carrément indifférent-es.
Hidaget, bosniaque arrivé aux États-Unis il y a 23 ans, estime que Donald Trump n’a aucune réelle envie de devenir président. «Ce n’est pas ce dont il a envie. Il veut simplement du pouvoir. Je pourrais le décrire plus durement, mais disons que je ne l’aime tout simplement pas!» Il voyait par contre en Bernie Sanders un politicien d’exception. «Ses politiques, ses actions, sa manière de vouloir changer le système, tout ça fait que les gens l’aimaient et avaient confiance en lui.»
Assis sur un banc de parc, Sam s’exprime sur le politicien local avec vigueur : «Je n’ai jamais eu d’intérêt pour Bernie et je n’en ai pas plus aujourd’hui. Dans les vieux jours, quand j’allais à l’Université du Vermont, il se promenait un peu pompeusement avec son veston en velours côtelé avec du suède sur les coudes. Je ne lui ai jamais vraiment accordé d’importance.»
Sans nécessairement être en désaccord avec les idées portées par l’ancien maire de Burlington, Sam croit qu’il n’a tout simplement pas ce qu’il faut pour devenir président des États-Unis. «Il a toujours eu des idées progressistes et il veut s’occuper des personnes âgées et des handicapé-es. C’est facile de contacter son bureau et il se présente toujours pour aider les citoyens et citoyennes, mais de là à le voir occuper la Maison-Blanche, c’est une autre histoire! Je ne l’aurais pas voulu là.»
Quant aux choix disponibles, il ne pourrait être plus clair : «Entre « hickory Hillary » et « Dump Trump », lequel est le moins pire? La case « aucun des deux » n’existe pas!»
«Je n’irai pas voter et je n’aime pas vraiment la politique, mais c’est un peu triste de voir à quel point on pourrait avoir mieux que Hillary Clinton et Donald Trump comme choix, confie Nicholas. En ce moment, c’est ce qui nous est proposé et on voit la corruption qui déborde de partout. C’est triste. On avait Bernie Sanders dans nos choix, et même si ce n’était pas lui, nous aurions pu avoir mieux. C’est un peu pour ça que je m’abstiens normalement de voter.»
Nicholas est cynique par rapport au système politique américain. Il explique que malgré la révolution politique que le sénateur indépendant a tenté de réaliser, il ne croit pas que les mécanismes auraient changé pour autant. «Ce système est pourri et arrangé; le vote populaire n’a même plus de réelle importance. Et cette histoire de n’avoir que deux partis, c’est comme si on devait choisir pour quelle équipe de football on allait crier. C’est stupide!»
Heather est directe : «Ceux et celles qui n’iront pas voter aux prochaines élections parce que leur candidat n’a pas gagné l’investiture sont franchement ignorant-es.» Elle ajoute qu’en fait, elle ne comprend pas pourquoi les gens ne vont pas voter, peu importe la raison. Elle considère qu’il s’agit d’un abandon et que ce n’est pas du tout la bonne manière de régler les problèmes auxquels les Américain-es font face.
«Ce pays fonce droit un mur, et ce, depuis déjà plusieurs années, affirme Jennifer. C’est désormais seulement l’argent et la cupidité qui mènent les politiques. Quand parmi toutes les personnes intéressantes et disponibles, on en est réduit à Hillary Clinton et Donald Trump, qui, à mon avis, sont deux horribles candidats, c’est déprimant. Je crois que je n’irai pas voter cette année, je n’en vois pas la raison.»
Elle spécifie que si elle ne va pas voter en 2016, ce n’est pas parce que Bernie Sanders n’est plus en lice, mais bien parce que les candidat-es proposé-es ne lui semblent pas intéressant-es. «Je ne crois pas qu’aucun des deux ne nous aidera réellement. Je ne suis en accord ni avec l’un, ni avec l’autre, alors je ne vois pas comment je peux leur donner ma voix.»
Une porte rarement fermée
Au bureau du sénateur Sanders, la défaite et l’amertume se font sentir. Alors que ce qui ressort des différentes discussions est l’ouverture et la présence du politicien, c’est un interphone et une porte fermée que nous rencontrons en plein milieu de semaine. Le préposé à l’accueil est très clair : «Nous n’avons rien à dire en ce qui concerne la campagne électorale. Nous nous concentrons de notre côté sur le travail de sénateur de M. Sanders.» Clic.
Si certains partisan-es ont semblé amers quand The Bern s’est finalement rallié à Hillary Clinton, les Vermontois-es ne semblent pas avoir de rancune. En fait, ils et elles se distancient de ces «faux partisan-es». Nick nous le disait lui aussi alors qu’il enfourchait son vélo : «Tout le monde le savait. Il n’avait pas le choix de l’endosser [Clinton] à un moment ou à un autre. On ne peut vraiment pas lui en vouloir!»
Plusieurs disent croiser Bernie Sanders régulièrement à Burlington et lui souhaite un repos bien mérité. Mais chacun et chacune, dans sa déception, semblent espérer un peu plus de ce «Future to believe in!»