Peu savent que les compagnies qui coupent des milliers d’hectares de forêts par années travaillent sur les terres de la couronne. Ces terres leur sont louées, de la même manière qu’un individu loue un appartement. Au moment où elles en ont fini avec les forêts restent des terres et des écosystèmes qui ressemblent à des cimetières naturels. La dernière étape : remettre le terrain au gouvernement avec le même potentiel naturel que quand ils l’ont reçu. Comme on repeint les murs d’un appartement à notre départ, les compagnies comme Papier Résolu se doivent de replanter le même nombre d’arbres présents à l’origine.
Photo reportage non exhaustif représentant une saison printanière de plantage en Ontario.
Un cimetière d’arbres. C’est peut-être la meilleure manière de décrire ce qui attend les planteurs et les planteuses à leur arrivée sur un «bloc» à reboiser. Loin d’un champ de ferme bien carré, les travailleurs et les travailleuses doivent surmonter des terrains qui ont parfois été rasés une décennie auparavant, ce qui complique la tâche lorsque la nature a repris le dessus. On doit donc très souvent se frayer un chemin dans une végétation dense, sauter par dessus des arbres morts, et faire fi d’arbres vivants pour y planter des arbres qui seront «payants» pour les forestières qui les couperont dans 50, 60 ou même 80 ans.
La saison printanière en Ontario comprend les mois de mai et de juin. Au petit matin du mois de mai, le camp s’éveille rarement dans une autre atmosphère que celle de la brume. Dans le nord de l’Ontario, les planteurs et les planteuses dorment avec des températures descendant parfois sous zéro et des journées allant jusqu’à 30 degrés. L’écart de température donne des matinées brumeuses où il est souvent difficile de comprendre la configuration d’un terrain.
Rares sont les journées qui roulent parfaitement sans qu’un pépin ne se présente. Le milieu de la journée est souvent un moment clé. «Ça passe ou ça casse». Branches dans les yeux ou chute sur un tronc d’arbre mouillé; les petites blessures sont quotidiennes et peuvent parfois venir à bout de l’humeur la plus positive de certains et certaines.
Le camp est l’endroit où l’on vit quand on ne travaille pas. La compagnie Brinkman and Associates Reforestation s’assure que les planteurs et les planteuses ont droit à une qualité de vie minimale. Pour la somme de 25 $ par jour, les travailleurs et les travailleuses reçoivent trois repas consistants, ont accès à des douches et autres installations comme une tente chapiteau où prendre leurs repas ou simplement pour relaxer par intempérie. Le frais quotidien inclut aussi les dépenses qui sont nécessaires pour le fonctionnement de la compagnie : le gaz et l’entretien pour les véhicules qui les amènent sur les lieux de travail ou le fonctionnement d’une génératrice leur donnant accès à l’électricité, par exemple.
Tout dépendant de l’endroit où est situé le camp, l’accès à différentes infrastructures sera plus ou moins difficile. Situé pendant la moitié de la saison sur le bord de l’autoroute transcanadienne, dans le microscopique village d’Upsala, les planteurs et les planteuses ont là accès à un petit restaurant qui offre Internet sans fil. Il s’agit d’un luxe que très peu de planteurs et de planteuses d’arbre ont. La majorité du temps, les campements se situent près des lieux de travail, à quelques heures de la civilisation, sur les chemins tracés par les compagnies.
Certains et certaines aiment se rassembler au campement pour créer ce qu’on appelle une Tent City. La proximité des tentes entre elles empêche toute forme d’intimité. Le côté positif vient toutefois également de ce voisinage serré. Les ours iront rarement s’aventurer dans un endroit aussi bruyant. Le nombre d’alarmes qui sonnent au petit matin permet aussi de ne jamais être en retard au travail.
D’autres planteurs et planteuses ont besoin de calme et de tranquillité pour se reposer. Plusieurs vont se battre avec la nature pour y installer leur tente bien à l’abri des discussions nocturnes.