À partir de début août 2015, les difficultés ont commencé pour Valeant. À la fin octobre 2015, alors que Valeant ne valait plus que 40 milliards de dollars, j’avais écrit un texte sur la stratégie de l’entreprise et ce qui avait causé les déboires de celle-ci. J’évoquais alors qu’une faillite de Valeant était possible.
Le prix de l’action de Valeant s’est maintenu jusqu’au 18 février dernier. Les retards dans la production de ses états financiers, certaines analyses négatives de l’entreprise et la nouvelle d’une enquête de la Securities and Exchange Commission (l’équivalent américain de l’Autorité des Marchés Financiers) ont fait passé la capitalisation boursière de Valeant de 40 milliards de dollars à 26 milliards. La valeur de l’entreprise a perdu 6,5 milliards de dollars dans les journées du 29 février et 1er mars 2016. L’entreprise a même connu un creux de 23,5 milliards de valeur au cours de la journée du 1er mars.
Valeant était le 5 août dernier la plus importante entreprise de la Bourse de Toronto avec près de 120 milliards de dollars de valeur. Seulement 7 mois plus tard, elle ne vaut plus que près de 26 milliards de dollars et est maintenant la 4e plus grande entreprise québécoise cotée en bourse (après le CN, BCE inc. et Alimentation Couche-Tard).
Ses déboires pourraient ne pas être encore terminés alors que plusieurs analystes ont diminué leurs prévisions pour l’entreprise. Certains analystes vont même jusqu’à prévoir que Valeant pourrait encore perdre jusqu’à 25 % de sa valeur ce qui l’amènerait sous la barre des 20 milliards de dollars.
Des risques de faillite
La débandade de Valeant pourrait mener ce géant à la faillite à moyen terme. L’entreprise à une dette qui totalise 31 milliards de dollars. Une telle dette est tout à fait soutenable pour une entreprise qui vaut 120 milliards de dollars, cette même dette est préoccupante pour une entreprise qui en vaut moins de 26 milliards. Lorsqu’une entreprise de moins de 20 milliards a plus de 31 milliards de dettes, sa situation financière devient précaire.
C’est pourquoi Moody’s réfléchit à diminuer la cote de crédit de Valeant et aussi pourquoi les obligations de Valeant dues pour 2025 ne valent maintenant que 79,75 % de leur valeur initiale. Selon les analystes de la banque Wells Fargo, Valeant avait 58 % des chances de faire faillite en 2015. Ce pourcentage ne devrait pas s’améliorer en 2016.
La situation de Valeant est dramatique pour ses 17 000 employés (dont 415 au Québec), pour ses créanciers et pour ses actionnaires. Elle doit aussi nous servir d’avertissement sur la fragilité de nos grandes entreprises qui ont bâti leur croissance principalement sur la dette. Penser toujours à court terme peut mener une entreprise à devenir la plus grande entreprise de la Bourse de Toronto pendant un court instant. Cette logique du court terme peut aussi, dans les sept mois suivants, faire perdre à l’entreprise 78 % de sa valeur et lui donner un risque sérieux de faillite à moyen terme. Valeant est loin d’être la seule entreprise à doper sa croissance avec de la dette. On devrait s’inquiéter collectivement que notre économie soit peuplée d’autant de géants aux pieds d’argile.