Il estime que la Norvège est loin d’être aussi verte que son image le laisse croire. « Nous émettons deux fois plus de gaz à effet de serre par personne que notre voisine, la Suède, indique-t-il. Plus globalement, la Norvège a parmi les plus grandes émissions de gaz à effet de serre (GES) par personne d’Europe. »
En effet, selon les chiffres de l’Agence européenne pour l’environnement, entre 1990 et 2012, la Norvège est passée de 50 millions de tonnes de GES émis à 53 millions pour 10 tonnes par habitant, alors que la Suède a fait chuter ses émissions de 73 millions de tonnes à 57 millions de tonnes, pour 5 tonnes par habitant. « Pire encore, la Norvège est le seul pays d’Europe occidentale qui n’a pas réduit ses émissions de GES depuis 1990, alors que des pays comme la Suède, le Danemark, le Royaume-Uni et l’Allemagne les ont réduites de 20 à 2 5% », fait remarquer Rasmus Hansson.
Ce bilan mitigé sur les émissions de GES serait surtout dû aux transports, dont les émissions ont augmenté d’environ 3 0% depuis 1990, mais aussi à l’exploitation de pétrole et de gaz qui est centrale dans l’économie norvégienne. « Bien que les grands partis au Parlement aient adopté et confirmé à de nombreuses reprises des cibles ambitieuses de réduction, soit 3 0% d’ici 2020 et 4 0% d’ici 2030, ils ne font rien », déplore le député vert.
À cela s’ajoute « l’exportation du changement climatique » que fait la Norvège en vendant ses énergies fossiles à d’autres pays. « Nous sommes l’équivalent environnemental d’un baron de la drogue sobre, dit-il. Nous avons exporté pour 14 milliards de tonnes de CO2 depuis 40 à 50 ans via le gaz et le pétrole et on s’en lave les mains. C’est le cadeau de la Norvège pour les changements climatiques d’un point de vue global. »
Toutefois, ce dernier a noté un changement depuis l’élection de 2013, où son parti a vu ses appuis passés d’environ 9 000 votes à 79 000, soit 3% de l’électorat. « Nous avons eu un bon momentum, notamment en raison de la chute du prix du baril de pétrole », explique-t-il. Comme au Canada, cette chute a causé des pertes d’emplois dans le secteur des énergies fossiles. « De cette façon, tous les partis ont dû trouver des solutions pour remplacer ces emplois et beaucoup de nos idées pour une transition verte ont été reprises », indique Rasmus Hansson. Il reste toutefois méfiant et attend de voir si cette reprise n’était que pour la rhétorique ou si les idées seront réellement appliquées.
Il fait d’ailleurs remarquer que le projet de bannir les voitures privées au centre-ville d’Oslo d’ici 2019, qui a fait parler partout dans le monde, n’est pasœ’oeuvre des partis au pouvoir au Parlement norvégien. C’est plutôt l’initiative d’une coalition entre les verts, les travaillistes et les socialistes de gauche, qui est au pouvoir au Conseil municipal de la capitale. Aucun de ces partis n’est inclus dans la coalition conservatrice du gouvernement norvégien.
Conférence de Paris
« Je vais me rendre à Paris étant donné que je fais partie du comité parlementaire sur l’énergie et l’environnement, mais je vais surtout trainer, comme tous les politiciens, souligne ironiquement Rasmus Hansson. Les politiciens font peu de choses qui ont du sens à ces conférences ».
Il estime d’ailleurs que la Norvège sera « grande parleuse, petite faiseuse » en demandant la même chose que la communauté européenne, soit 4 0% de réductions des GES d’ici 2030, mais en utilisant la bourse européenne du carbone pour y arriver.
« On a déjà constaté que ce marché du carbone ne contraint pas les entreprises à réellement réduire leurs émissions étant donné qu’il y a trop de quotas, donc les prix sont extrêmement bas », s’indigne-t-il. Il croit aussi que la Norvège profitera du système onusien de Mécanisme de développement propre, qui serait souvent digne d’un « canular ». « C’est impossible de savoir si, par exemple, l’argent que la Norvège envoie en Ouganda est utilisé pour créer une forêt ou finance un projet façade qui dans les faits est la construction de puits de pétrole », mentionne le vert. De cette façon, la Norvège réduirait artificiellement son bilan, sans réellement contribuer à la lutte au changement climatique.
Malgré ses critiques, Rasmus Hansson est excité à l’idée de revoir un Canada leadeur en environnement avec l’élection de Justin Trudeau. « J’ai visité le nord du Canada depuis les anné s 70, notamment comme biologiste et j’étais frustré de voir le tournant que le pays avait pris récemment, mentionne-t-il. Je suis très heureux des signaux qu’envoie Trudeau et j’espère réellement que le Canada reprendra son rôle de leadeur pour l’environnement et contre les changements climatiques dès la Conférence de Paris ».