Pour Christian Nadeau, président du conseil exécutif de la Ligue et le réalisateur de la capsule, il était important d’ajouter un super visuel au texte, pour tenter de rejoindre le plus grand nombre et de joindre l’artistique au politique. « Nous trouvions intéressant de faire appel à des images de films, parfois très vieux, pour y faire coller le texte », explique M. Nadeau. Même son de cloche du côté d’Éric Robertson, de 99% Média, qui a monté la capsule.
Diffusé presque entièrement en noir et blanc, on aperçoit dans la vidéo des images des films de Georges Méliès, du Cabinet du docteur Caligari, de dessins animés et d’images documentaires. La narratrice, la comédienne Pascale Bussières, lit le manifeste dans son intégralité.
« Plus que dénoncer, nous voulons, à travers ce manifeste et la vidéo, qu’une réelle prise de conscience se fasse. La démocratie est un processus continu, qui va au-delà des périodes électorales, d’où l’importance d’un organisme comme la Ligue » explique le professeur universitaire.
Pour lui, La Ligue représente un des boucliers permettant de lutter contre ce qui est appelé dans le texte la « spirale d’affolements », entretenue par les élites politiques et économiques. « Ce que nous voulons rappeler dans notre texte, ce n’est pas seulement les dérives sécuritaires et identitaires. C’est aussi ce que masquent ces dérives : les inégalités sociales, l’écart croissant entre riches et pauvres, la stigmatisation des plus démunis et en particulier des peuples autochtones. »
Monsieur Nadeau considère que le discours identitaire et sécuritaire est souvent pensé en parallèle. Ce dernier croit aussi que des changements profonds sont nécessaires dans les pratiques politiques, notamment en réinvestissant massivement dans les politiques sociales, et en s’intéressant prioritairement aux enjeux environnementaux et autochtones. « Il faut vraiment un redressement de cap de nos politiques, et une grande reconstruction de nos institutions », croit M. Nadeau, comme il l’a déjà expliqué dans un billet.
À la veille des élections fédérales
« Si nous intervenons avec un manifeste en pleine campagne, ce n’est pas parce que nous espérons avoir un effet direct sur le vote. C’est d’abord et avant tout pour rappeler que même dans les moments où tout se rapporte aux élections, ces dernières ne sont qu’un des éléments de notre démocratie, et que les luttes doivent se poursuivre, car nous vivons une période trouble », tient à préciser l’essayiste. Il ajoute également que si les politiques canadiennes doivent être remises en question, celles du Québec ne sont pas en reste, comme il est expliqué dans le manifeste. «Le Québec n’est pas étranger aux décisions qui se prennent dans le reste du pays, comme on l’a vu pendant les élections fédérales, notamment avec la question du niqab, largement récupérée par le Bloc Québécois, par exemple», ajoute-il.
Par la diffusion massive de la vidéo, dont la sortie était samedi la Ligue espère avoir un écho auprès de la population et qu’elle réfléchira avant d’aller aux urnes, et au-delà, à la société dans laquelle nous vivons, et aux messages qui nous sont véhiculés, autant par nos gouvernements que par les médias.
« Les dérives sécuritaires et identitaires dont nous parlons dans notre manifeste ne sont plus seulement des épisodes ponctuels, ils sont maintenant bien installés (et probablement pour longtemps) dans les mœurs et dans le vocabulaire politique. Et lorsque nous réagissons avec vigueur contre ces dérives, nous sommes qualifiés de “bisounours”, de “naïfs”, et que sais-je encore… », déplore M. Nadeau. La vidéo du manifeste intitulé La solidarité contre l’obsession sécuritaire et identitaire est une réaction à ses dérives, qui, l’espère M. Nadeau, permettra d’être un outil supplémentaire à une réflexion collective politique et sociale.