Au moins 10 000 personnes se sont rassemblées pour l’Action nationale de la MMF à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté. Avec leur thème «Libérons nos corps, notre Terre et nos territoires», les manifestant-e-s voulaient dénoncer la pauvreté et la violence faite aux femmes, et demandent le respect des droits des peuples autochtones. Les manifestant-e-s ont marché le long d’un trajet de 2 kilomètres pour conclure ces semaines de mobilisation.

Marche mondiale des femmes à Trois-Rivières
Gracieuseté Fédération des femmes du Québec

« Notre objectif aujourd’hui est que les hommes et les femmes repartent plus mobilisés que jamais », affirme d’emblée la nouvelle présidente de la Fédération des femmes du Québec, Mélanie Sarazin. La Marche mondiale des femmes, qui se tient aux cinq ans, s’est alliée à la caravane des résistances et solidarités féministes, qui a parcouru près de 5000 km pour entendre les réalités des femmes aux quatre coins de la province.

Une soixantaine d’artistes ont donné un spectacle engagé, appelé «Je chanterai pour elles». Une cinquantaine de «tricots-graffitis» ont été installés le long de la marche et seront exposés au Musée québécois de culture populaire de Trois-Rivières par la suite.

Plusieurs politiciens ont participé au rassemblement, dont les candidats néodémocrates Anne Lagacé Dowson et Alexandre Boulerice, le candidat vert JiCi Lauzon et les députées solidaires Manon Massé et Françoise David. Cette dernière est l’instigatrice de la première Marche mondiale des femmes au Québec en 1998, un événement qui s’est répandu à travers le monde. Des manifestations semblables se sont tenues partout samedi au Canada et dans une soixantaine de pays.

Prendre les grands moyens

Malgré la convergence des deux événements, la mobilisation des dernières semaines a été peu médiatisée, déplore Mélanie Sarazin, notamment en raison de la campagne électorale fédérale. « En 2015, on a beau revendiquer et interpeller l’État, essayer de faire comprendre au gouvernement que ses mesures creusent les inégalités entre hommes et femmes, et entre les femmes elles-mêmes, on ne gagne plus rien », déplore Mélanie Sarrazin. Alors on a décidé qu’on va s’organiser entre nous, de travailler régionalement et de commencer à construire nous-mêmes notre société.»

« En 2015, on a beau revendiquer et interpeller l’État, essayer de faire comprendre au gouvernement que ses mesures creusent les inégalités entre hommes et femmes, et entre les femmes elles-mêmes, on ne gagne plus rien », déplore Mélanie Sarrazin.

La question des 1200 femmes autochtones disparues et assassinées tient une place spéciale au cœur de la mobilisation de cette année. Bien que le Parti libéral du Canada et le Nouveau Parti démocratique se soient engagés à mettre sur pied une commission d’enquête nationale, la Fédération des femmes du Québec et Femmes Autochtones du Québec ne croiront les promesses des partis que lorsque le processus sera enclenché. Les organismes étudient déjà les possibilités de tenir une commission d’enquête autrement que via l’État fédéral.

Plus largement, les militantes veulent investir les lieux de décisions politiques. « On veut créer de nouvelles alliances, des fronts communs avec toute la société civile pour faire bouger les choses, explique Mélanie Sarazin. Il y a un momentum pour l’éducation populaire en ce moment, on essaie de sensibiliser le citoyen de tous les jours aux enjeux féministes, car ça touche tout le monde. »

« On veut créer de nouvelles alliances, des fronts communs avec toute la société civile pour faire bouger les choses, explique Mélanie Sarazin.

Un nouveau visage

Ce souffle de renouveau a trouvé une ambassadrice convaincue en la nouvelle présidente de la Fédération des femmes du Québec, Mélanie Sarazin. Issue du milieu féministe communautaire, elle a été coordonnatrice d’un centre de femmes en Outaouais pendant cinq ans. De fil en aiguille, elle s’est impliquée dans les États généraux de la FFQ, qui se tiennent aux dix ans, et est «tombée en amour» avec la fédération.

« Mon parcours est celui de l’école de la vie, je n’ai pas une tonne de gros diplômes. J’ai vécu la violence et la pauvreté moi-même, et quand je parle aux femmes qui m’entourent, je comprends leur réalité. Je crois que c’est un atout pour la fédération d’avoir une fille de la base à sa tête », dit cette militante qui n’a pas la langue dans sa poche.

Malgré la sourde oreille que font les gouvernements du Québec et du Canada à leurs revendications, la nouvelle présidente de la FFQ ne perd pas espoir. Selon elle, la méthode de travail inclusive léguée par sa prédecesseure, Alexa Conradi, a permis d’élargir le champ d’action de la FFQ et d’inclure davantage de militantes en région. Mélanie Sarazin compte bâtir sur son legs pour mieux défendre les intérêts des femmes en cette période d’austérité, une tâche qui s’annonce ardue.