Personnellement, je me suis aussi prêté à l’exercice pendant la première journée de vote par anticipation. Comme ces personnes, pendant mon vote, j’ai porté la raison de mon choix. Tout au long de mon vote, je portais dans mes bras ma fille d’un an et demi. Mon X, pour fois-ci, je l’ai fait en fonction d’elle, de ses deux frères et de son 3e frère qui naîtra bientôt.
Mon vote, je l’ai choisi parce que je veux que ma fille puisse s’informer à Radio-Canada quand elle aura l’âge de s’y intéresser.
Je veux qu’elle grandisse dans un pays qui possède encore son service postal.
Je veux que la ferme laitière familiale à côté de chez nous existe encore et que ma fille puisse aller y voir les vaches avec ses enfants.
Je veux que si elle décide de ne pas avoir d’enfants, elle puisse, si c’est nécessaire, se faire avorter.
Je veux que tous les Noëls de sa vie soient blancs.
Je veux qu’elle puisse se sentir en sécurité quand elle achète de la nourriture, qu’elle boive de l’eau ou qu’elle prenne l’ascenseur parce qu’il y aura encore des fonctionnaires qui vérifieront régulièrement la sécurité de ces choses.
Je veux qu’elle puisse encore se baigner dans la majorité des rivières du Québec.
Je veux qu’elle vive dans un pays où les politiques sont faites en fonction de la science.
Mon vote, je l’ai choisi parce que je ne veux pas que ma fille ait un jour à choisir entre ne pas être soignée ou faire faillite.
Je ne veux pas qu’elle s’endette pour le restant de ses jours pour faire des études universitaires.
Je ne veux pas qu’elle vive des décennies de récession lorsque le pétrole ne sera plus nécessaire pour faire rouler nos autos.
Je ne veux pas qu’elle se fasse espionner par son gouvernement.
Je ne veux pas qu’elle puisse se faire arrêter et détenir sans procès parce qu’elle s’oppose au projet d’une riche compagnie qui s’est payé des lobbyistes à Ottawa, ou parce qu’elle s’implique dans son syndicat pour améliorer ses conditions de vie.
Je ne veux pas qu’elle travaille dans la précarité.
Je ne veux pas qu’elle vive moins longtemps que moi.
Je ne veux pas que notre gouvernement la pousse à rester à la maison si jamais elle devient mère.
Je ne veux pas qu’elle vive dans un pays où on choisit de remplir nos prisons plutôt que nos universités.
Je ne veux pas qu’elle vive dans un pays qui est en guerre de façon permanente.
Je ne veux pas qu’elle vive dans un pays où l’on est forcé de vivre dans la pauvreté quand on devient trop vieux pour travailler.
Je ne veux pas, si elle choisit de porter le voile, qu’elle se fasse attaquer dans la rue parce qu’un politicien veut faire croire à la population que ce choix de ma fille serait plus scandaleux que la corruption et le projet de destruction de l’État qu’il mène lui-même.
C’est pourquoi je vous invite, vous aussi, à aller voter en portant vos enfants dans vos bras. Alors que plusieurs personnes iront voter en fonction de leur peur, de leur haine, de la farce macabre qu’a été la campagne ou des patates dans lesquelles ils sont, il est important qu’une majorité de gens aillent voter en fonction de la chose la plus importante qu’il soit : nos enfants, et l’espoir de leur léguer un monde meilleur que celui qu’on a connu.