Au Québec, nous sommes relativement chanceux. Les médias sont généralement assez honnêtes pour être capable de parler de réchauffement climatique sans donner la parole à une personne qui en doute. C’est possiblement pour ça que le document de TransCanada coulé en douce par Greenpeace, révélait que nous avions une proportion plus forte d’ « ultraverts » ici que dans le reste du Canada. Peut-être que lorsqu’on ne nous bombarde pas avec de la pseudo-science, on a une chance d’y être un peu plus insensible.
Bien entendu, nous avons nous aussi notre lot de sceptiques qui voient une conspiration dans le haut taux d’experts qui croient dans aux changements climatiques. À 97%, on est proche d’un taux d’approbation soviétique. Et puis, soyons sérieux et sérieuses… Vous ne trouvez pas qu’il fait froid tôt cette année? Vous avez vu ces tempêtes de neige dignes d’une journée sans classe dès le début novembre? Peut-on vraiment parler de réchauffement climatique…? De tels arguments démontrent plus le manque de rigueur de celui ou de celle qui les tient plutôt que celui des scientifiques qui travaillent sur le sujet depuis des années. D’une part, on semble oublier que la neige en novembre, c’est normal. C’est d’avoir la première tempête après le 20 décembre qui est une exception, pourtant de plus en plus fréquente.
Ensuite, les changements climatiques sont beaucoup plus complexes que simplement la transformation de Montréal en Mexico (si ce n’était que ça…). Il faut apprendre à regarder plus loin que le bout de sa rue. La planète, elle est grande et une année dure 365 jours. Quand on parle de l’augmentation de la température moyenne, eh bien voilà. C’est une moyenne. Et il faut apprendre à distinguer la météo du climat. Chose certaine, les glaciers fondent à un rythme qui s’accélère. Et qui dit fonte, dit une quantité importante d’eau très froide qui se déverse dans les océans. En plus d’augmenter le niveau des mers et de fragiliser de plus en plus les côtes et ceux qui y habitent, ce transfert aquatique a comme effet de bouleverser les courants marins, de déstabiliser des régulateurs climatiques et perturber des écosystèmes de plus en plus fragiles.
Par ailleurs, sans trop de surprise, on retrouve dans le camp des sceptiques plusieurs grandes entreprises pétrolières qui financent des groupes « citoyens » pour faire la promotion d’une rupture du consensus scientifique. Ils utilisent alors des graphiques tronqués ou des rapports dont la scientificité est plus que douteuse pour essayer de nous rassurer sur l’état du réchauffement climatique. C’est que, sur les 17 dernières années, c’est relativement stable. Ce qu’ils ne disent pas, bien entendu, c’est que cette relative stabilité du climat suit une hausse vertigineuse et exponentielle de la température moyenne et que leur graphique ne prend pas en considération la température des océans, qui n’a pas cessé d’augmenter.
Il reste cependant que l’un des plus grands ennemis des changements climatiques, c’est que ceux-ci ne cadrent pas bien dans le système capitaliste dans lequel nous vivons. À chaque fois que nous parlons de changer notre mode de vie, de l’importance de réduire nos gaz à effet de serre, il faut parler des coûts et des profits qui y sont associés. Protéger les bélugas? Mais bien sûr : ils attirent des touristes! Pour ou contre les pipelines? Bien… combien d’emplois? J’veux dire, bien entendu que j’aimerais mieux des investissements d’une industrie plus verte, mais… en attendant…
Au Québec, contrairement à nos voisins du Sud, on y croit au réchauffement climatique. On fait des blagues, pendant les tempêtes, ou quand notre trop court été est vraiment trop court, mais on y croit, surtout. Par contre, au Québec comme ailleurs, on a fini par croire que l’économie était l’alpha et l’oméga. Qu’il fallait se battre contre la destruction du monde d’abord et avant tout parce que celle-ci pourrait affecter notre qualité de vie. Et que c’est en misant sur le développement économique qu’on va, si jamais on va, régler le problème. Il serait temps de changer l’équation : c’est notre « qualité » de vie qui menace de détruire le monde, c’est l’insouciance du développement économique et des industries qui nous précipite dans le gouffre. On peut bien rire des affiches sur le bord de l’autoroute qui essaie de nous faire croire que c’est le soleil et non l’humain qui serait le moteur derrière les bouleversements climatiques, mais tant que nous ne sommes pas en train de revoir radicalement, et collectivement, c’est quand même l’affiche qui gagne.